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30 ans d'Interreg: les jeunes plus proches de la lune grâce à NANOSTAR. Entretien avec Filippo Cichocki
Catégorie Gestion des projets approuvés
Cette année, Interreg fête son trentième anniversaire en se concentrant sur trois thèmes d'intérêt pour la cohésion européenne: la jeunesse, une Europe plus verte et nous avons tous des voisins. Dans ce contexte, tous les mois, nous interrogerons l'un de nos projets emblématiques liés à l'une de ces thématiques.
Ce mois-ci, nous avons discuté avec Filippo Cichocki, professeur invité à l'Université Carlos III de Madrid, qui avec son collègue Julio Posada Román et les professeurs José Antonio García Souto et Mario Merino Martínez coordonnent les défis pour les étudiants du projet NANOSTAR. NANOSTAR offre aux étudiants la possibilité de vivre un processus d'ingénierie spatiale réel et complet qui comprend la conception, l'assemblage et la documentation. En formant des équipes, ils peuvent participer à la construction d’une mission spatiale avec un nanosatellite et à la construction de ses différents éléments.
- Quel rôle les jeunes jouent-ils dans votre projet?
Le projet NANOSTAR se développe au travers de plusieurs types de défis d'ingénierie dans lesquels le rôle des jeunes étudiants varie. Certains défis sont compétitifs: les étudiants s'inscrivent pour participer à la conception préliminaire d'une mission nanosatellitaire. Organisés en groupes, ils conçoivent les principaux sous-systèmes d'un nanosatellite pour atteindre les objectifs de cette mission, et rivalisent avec d'autres groupes d'étudiants de la même université ou d'autres universités participant au réseau NANOSTAR. Ensuite, il y a d'autres défis spécifiques, indépendants, qui sont organisés par chacune des universités du projet et se concentrent sur la conception ou le développement d'une technologie particulière pour les nanosatellites ; cette dernière pouvant être un composant de communication, une stratégie de contrôle ou une plate-forme pour répétitions. Étant donné leur nature très variée, les activités développées au travers de ces défis varient aussi.
- Quelle est l'importance de ces défis pour le bon développement du projet?
Les deux types de défis proposés dans le cadre du projet sont des activités très pertinentes pour un ingénieur travaillant dans le domaine aérospatial.
D'une part, les défis concurrentiels ressemblent aux procédures mises en place par l'Agence spatiale européenne pour sélectionner les propositions de missions spatiales les plus prometteuses afin de financer leurs différentes phases de conception qui leurs permettront d’atteindre les phases opérationnelles. Le premier défi compétitif de mission spatiale, qui s'est déroulé entre février et mai 2019, consistait en une mission de survol vers la Lune avec des nanosatellites. Le défi a compté sur la participation de 15 équipes, réunissant plus de 100 étudiants. Le deuxième défi concurrentiel, qui vient de se terminer, a porté sur une mission très différente, caractérisée par une charge utile avec des vers Roscoff, qui permettent le recyclage du CO2 et la production d'O2, ce qui est très utile pour le développement de systèmes du maintien de la vie et de contrôle de l'environnement (ECLSS: systèmes de contrôle de l'environnement et de maintien de la vie).
D'autre part, les défis spécifiques qui débuteront dans les prochaines semaines permettront aux étudiants de chaque université d'avancer dans des compétitions spécifiques liées aux phases de conception des nanosatellites. Ces dernières commencent normalement lorsqu'une conception de mission préliminaire a été approuvée et une agence spatiale, comme l'agence spatiale européenne, décide de poursuivre le financement de ses activités. Jusqu'à présent, une trentaine de défis ont été organisés parmi toutes les universités impliquées dans NANOSTAR.
- D'où vient l'idée de NANOSTAR? Quelle est la valeur ajoutée de compter sur des jeunes pour ce projet?
C'est très positif. Premièrement, les jeunes liés à ce secteur sont très motivés et ont beaucoup de passion pour ce qu'ils font. Et même s'ils n'ont pas une très grande expérience, ils sont capables, avec des conseils, d'effectuer des tâches d'ingénierie très avancées.
D'un autre côté, chez NANOSTAR, nous croyons en une formation pratique, au travers de laquelle les étudiants puissent développer toutes les compétences nécessaires à leur futur travail d'ingénieur spatial. En ce sens, les nanosatellites ont un net avantage, non seulement en tant qu'outil pédagogique, mais aussi en raison de l'intérêt intrinsèque qu'ils suscitent dans l'industrie, et qui s'est intensifié ces dernières années. Enfin, un des aspects qui a motivé le financement de ce projet SUDOE, il y a un retard technologique dans le sud-ouest de l'Europe concernant cette technologie spécifique et il n'y a pas de meilleur moyen d’y mettre fin qu’en misant sur la formation de ses jeunes.
- Qu'est-ce que NANOSTAR apporte aux jeunes qui y participent?
C'est un point très positif pour leurs CVs de pouvoir participer à un concours public pour la conception d'un nanosatellite, financé par l'UE et avec une forte participation. De plus, le projet bénéficie des conseils d'experts d’universités prestigieuses.
Participer à ces défis leurs permet de développer des connaissances qui peuvent ne pas être développées dans le cadre d’un cursus universitaire normal. Les étudiants peuvent mettre leurs connaissances en pratique au travers du développement d'une mission spatiale, d'ingénierie des systèmes, de la gestion de projets spatiaux ou de la conception détaillée d'un composant nanosatellitaire, tout en apprenant à travailler en équipe avec d'autres étudiants européens. Les défis leur apprennent à être patients, rigoureux, à organiser des réunions périodiques pour faire avancer le projet, savoir répondre au départ d’un membre de l’équipe...
- Comment le travail est-il organisé avec les universités de différents pays?
Chaque université a sa propre culture de travail et ses propres domaines de connaissances dans lesquels ils se distinguent, ils se complètent donc. Dans la plupart des cas, les groupes d'étudiants proviennent des mêmes universités, mais nous encourageons également la création de groupe interuniversitaire. C’est très positif car cela nous permet d'évaluer s'il est possible de travailler en équipe avec différentes universités et d’identifier les difficultés liées à la conception en equipe, sans face à face. Évidemment, la distance physique peut devenir un obstacle mais à travers le projet, nous cherchons à développer des méthodologies de travail communes et à distance. Ainsi, nous avons développé une plateforme logicielle pour concevoir des nanosatellites, avec les mêmes outils, homogénéisant le processus de développement des nanosatellites.
- Quel est le profil des étudiants participants?
Nous avons principalement des étudiants en ingénierie spatiale mais aussi d'autres disciplines. C’est indispensable, car l'ingénierie spatiale, en elle-même, est totalement interdisciplinaire. La conception implique différents domaines de connaissances. Ainsi, par exemple, des ingénieurs en électronique, en télécommunications mais aussi des mathématiciens y participent.
De même, nous comptons sur une participation mixte en matière de genre, bien que le niveau d'égalité souhaité n'ait pas encore été atteint: dans le dernier défi, par exemple, nous avons compté sur la participation de 80 personnes dont environ 20 femmes. Ces données s’accordent avec le pourcentage de femmes présentes en ingénierie dans les universités espagnoles (environ 25%).
D'autre part, de nombreuses universités ont des associations d'étudiants qui se consacrent à la résolution de problèmes technologiques. Nous en avons particulièrement encouragé leur participation car ce sont probablement les meilleurs candidats. En effet, ils sont très motivés, avec beaucoup d'expérience pratique et cherchent à gagner en visibilité. Par exemple, nous développons l'un des défis spécifiques avec l'association STAR de l'Université Carlos III qui se consacre au développement et au lancement de fusées en tant que plate-forme pour tester des composants nanosatellitaires.
- Comment ces types de projets influencent-ils la vision des jeunes dans l'UE? Comment inciteriez-vous les jeunes à participer au projet?
La participation à des réseaux de ce type permet aux étudiants de se familiariser avec les enseignements d'autres pays et d'établir des contacts avec d'autres étudiants dans le sud de l'Europe. Nous pensons que des actions de ce type sont très positives pour renforcer le sentiment d'appartenance à l'Union européenne des jeunes. Ils relient l'Europe aux opportunités de développement de projets concrets.
Sans aucun doute, NANOSTAR est une excellente opportunité de mettre en pratique ce qu'ils apprennent dans le cadre de leur formation universitaire, travailler en équipe et développer des compétences pour travailler à l'avenir dans une Europe de plus en plus interconnectée.
Merci beaucoup Filippo! N'hésitez pas à visiter le site internet du projet et à découvrir tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les défis spatiaux. Aussi, nous vous invitons à découvrir les témoignages d'Alejandro et David, deux étudiants de l'Université Carlos III qui ont participé aux défis.